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29 novembre 2011 2 29 /11 /novembre /2011 19:53

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La tête au contact de la vitre, je profite d'un panorama secoué par les élans du bus. D'un oeil tout endormi je perçois la multitude d'étoiles qui naissent du contact entre la surface de la mer et les rayons du soleil. J'aime cette carte postale irréelle, ce bleu si pur du ciel se mêlant à celui plus irrégulier de la mer. La nuque un peu endolorie, je tâtonne dans mon sac à la recherche de mon écharpe qui enroulée sur elle-même constituera un parfait petit oreiller. Je m'arrête sur le détail des fils dorés qui parsèment son tricotage uni et avec un soupir de contentement, la fixe délicatement entre mon épaule et la vitre froide, dure et si violente lors des changements de direction du chauffeur. Les genoux tant bien que mal repliés, en position foetus sur deux sièges, je m'autorise enfin, une fois les dernières vagues de passagers passées, à plonger corps et âme dans l'inconscient.

 

Et c'est alors que commence ma somnolence. Perturbée, en sommeil léger, par des voix qui se rapprochent puis s'épuisent ou des annonces informatives dispensées par le contrôleur, mais dans un état de torpeur où se mélange joyeusement rêve et réalité. Je dors, je récupère. Les minutes passent plus vite, bousculées soudain par la perte d'instant, se transformant progressivement en heure. Je m'éveille parfois et vérifie, à l'aide d'une seule paupière soulevée, si le bus roule toujours et où en est le décompte des minutes qui me séparent encore du moment de l'arrivée. Puis je me rendors, presque aussitôt.

 

Et c'est au milieu d'un rêve qu'une voix me frôle doucement mais dont l'attardement m'intrigue et me pousse à revenir plus consciemment à la réalité :

" Bonjour Madame, auriez-vous quelques minutes à m'accorder ? Je fais partie d'une agence qui étudie la fréquentation de cette ligne de bus, cela vous embêterait-il de répondre à 2 ou 3 questions ? "

 

Je comprends, doucement, que la voix ne m'interpelle pas moi, marmotte de la matinée, mais concerne l'échange qu'entretient ma voisine de l'autre côté de l'allée centrale avec une femme dont je n'aperçois que le dos ainsi que la longue tresse dorée. Je prête alors une oreille plus indiscrète aux propos échangés :

" Merci Madame. Alors, tout d'abord, à quel arrêt êtes-vous monté dans le bus ? Et où habitez-vous ? Quel moyen de locomotion avez-vous utilisé pour vous rendre à l'arrêt de bus ? Où allez-vous ? Possédez-vous une voiture ? Avez-vous bénéficié d'un tarif préférentiel pour ce trajet ? Pour quel motif vous déplacez-vous : professionnel, visite amicale/familiale, raison touristique ? A quelle fréquence annuelle utilisez-vous cette ligne ? Êtes-vous au courant des nouvelles offres d'abonnement ? "

 

Au milieu de cette avalanche d'interrogations perçaient 2 ou 3 questions personnelles qui donnèrent lieu à une explication plus détaillée de la personne questionnée :

" - Quel est votre statut au sein de la société ? 

- Je travaille toujours, je suis même infirmière.

- Nous n'avons pas besoin d'autant de détails Madame. Et puis-je vous demander votre âge ?

- J'ai 59 ans ( voix plus faible ).

- 59 ans ( voix aussi forte que pour le reste du questionnaire ). Alors, bientôt la retraite ! ( sourire franc et jovial ) En tous cas je vous souhaite une très bonne journée et vous remercie, Madame, du temps que vous nous avez accordé. "

 

La jeune femme se tourne alors vers moi, et je subis, amusée, le même questionnaire. Je sens que cet événement anodin contient son lot de richesses quand mon interlocutrice, après m'avoir remerciée, interpelle le voyageur suivant.

 

Il s'agit d'un vieux monsieur, très silencieux depuis le début du trajet, qui sans dormir me semblait lui aussi perdu dans ses pensées. L'intervention de la jeune femme le surprend et c'est avec des mots un peu affolés qu'il répond aux premières questions :

 

" Je me rends à Lançon de Provence. Je n'ai pas de véhicule. C'est la deuxième fois que j'y vais en 5 ans. C'est là où ma fille habite ... ( silence ) Je ... Je ne suis pas allé la voir depuis très longtemps. C'est ... compliqué. "

 

Son interlocutrice, un peu gênée, essaie de recadrer le discours :

" - Et ... Vous êtes au courant des nouvelles offres d'abonnement ?

- Je ne sais pas si je serai amené à revenir. Je suis vieux vous savez. Si vieux que le seul motif d'un tel voyage se révèle être le pardon. Mais je ne sais pas si elle me l'accordera. C'est dur vous savez, de vivre avec de tels conflits ancrés en vous. Et si c'est dur de vivre avec, je n'imagine même pas avec le poids des remords, une fois que la mort m'aura rattrapé. Je regrette ... Oh si vous saviez à quel point je regrette ( voix chevrotante ) ...

- Bien, j'espère en effet pour vous que vous serez amené à reprendre cette ligne prochainement.( sourire ). Et pour finir, Monsieur, puis-je vous demander votre âge ?

- J'ai 78 ans, Mademoiselle. 

- 78 ans, très bien. Eh bien encore merci de votre participation Monsieur et bonne chance pour la suite. "

 

L'audit terminé, la jeune femme à la tresse passe, imperturbable au client suivant. Mais mes yeux restent fixés sur le haut du siège du vieil homme, qui ne laisse apparaître qu'une poignée de cheveux blancs peignés de façon à encercler dignement le sommet d'un crâne à la peau mate. Mon attention quitte la mélodie des questions et mes oreilles guettent le moindre mouvement de cette silhouette frêle. Ce questionnaire a bouleversé mon petit vieux qui, pour masquer sa pudeur, repeigne machinalement ses cheveux. Et mon regard suit le mouvement de cette main qui après avoir effleuré le sommet de la tête, glisse lentement au contact de la joue. Un seul, petit, micro, geste. Celui de l'index pliant sous le poids des rides qui efface doucement la larme née de ses confidences.

 

Et ce geste m'émeut. 

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23 novembre 2011 3 23 /11 /novembre /2011 13:02

Image-3-copie-3.pngJe me souviens de ce pincement au coeur. Du doute noir qui s'immisce au plus profond. Des larmes ravalées. Du goût amer dans la gorge. Des mots qui n'arrivent pas à sortir. Des moments où tout l'esprit s'embrouille. De l'insomnie inquiète. D'une souffrance vicieuse qui naît de nos propres failles. Des traces noires sur l'oreiller. Des yeux fripés au réveil. De convictions en pagaille.

 

Le jour perce enfin à travers les lourds rideaux blancs. Recroquevillée sur le côté, une jambe repliée par-dessus la couette, les yeux grand ouverts, j'hésite. Je m'étire d'un faux sommeil tranquille et enjambe l'autre partie du lit. Devant la glace de la salle de bain je découvre ma jalousie. Je chiffonne ce visage nerveux qui me déplaît, l'efface d'un coup de jet d'eau et saute rapidement dans un pantalon. Un pull enfilé au hasard, j'attrape ma veste, mon écharpe et suis déjà dans l'ascenseur.

 

J'ai peur. Mais le soleil qui m'éblouit à la sortie me redonne du poil de la bête. J'ai la gueule de bois. Mais dans la rue je ne suis plus seule pour laisser courir mes pensées. Et tant mieux. Une maman bien réveillée pousse un landau de jumeaux, le sourire au lèvres. Mon regard croise celui d'une serveuse affairée. Deux papy s'écartent entre deux rires pour me laisser passer. J'entre dans un magasin et me fraie un passage à travers les différents rayons emplis d'enfants et de familles en famille justement. La vie fourmille et me frôle de très près. J'attrape un paquet de pommes de terre surgelés et me dirige vers la caisse. Le vendeur me sourit en me rendant la monnaie. Je sors.

 

La luminosité enveloppe toute la ville en ce dimanche matin. Des cris d'enfants s'échappent du parc non loin tandis que des habitués discutent à la terrasse d'un café. Des petits vieux comparent leurs problèmes de vieillesse sur un banc près de la place de la mairie et dans le ciel bleu trois nuages blancs jouent à cache-cache. Je me sens plus légère. Je respire à nouveau et aime percevoir mon souffle chaud à travers l'air frais. 

 

D'un pas décidé je prends le chemin du retour. Et alors que défilent les étages mon esprit redevient plus tranquille. Derrière la grosse porte de l'appartement je perçois le bruit de l'eau qui coule. J'hésite avant d'entrer. Est-il sous la douche ? La clef tourne dans la serrure et je distingue son dos devant l'évier. J'enlève mon manteau et m'allonge sur le canapé remis en place depuis mon départ. Le bruit de l'eau s'interrompt. Timidement, je l'entends s'approcher. Et je ferme les yeux. Il me regarde et repart à ses activités mais avec un voile de velours sur leurs bruits. Je respire. Doucement. Quelques minutes après il revient vers moi. Et trouve mon regard plongé dans le décors de la fenêtre, au loin. Il s'assied. Et les mots comme les pincements au coeur me reviennent. Et les larmes aussi. Mais celles-ci trouvent le mouchoir qu'il me tend d'un regard tout doux, presque compatissant. Et j'explose. Et il m'écoute. S'énerve aussi. Mais notre passion une fois rassurée se relève de tout et ses bras me ramènent contre eux. Et son nez frotte contre mon oeil fatigué. Ses mots sont autant de douceurs susurrées à mon oreille et mon coeur s'en réchauffe, petit à petit, délicieusement. Je relève la tête pour trouver ses lèvres et échappe un rire à la vision de son bout du nez grimé du noir de mon mascara. Je l'aime, surtout comme ça. Protecteur, un verre de jus d'orange dans une main et un aspegic en suspension dans l'autre, il me comble. Fatiguée, je me blottis dans le coin du grand canapé, enserrant le petit coussin gris et me recouvrant du plaid tout doux posé sur un coin. Il s'en va à la cuisine et revient quelques instants plus tard avec deux grandes assiettes fumantes. Deux oeufs au plat, trois knacks, deux tranches de pain de mie et trois galettes de pommes de terre. Un super brunch. Celui de la réconciliation.

 

Je t'aime.

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10 novembre 2011 4 10 /11 /novembre /2011 08:00

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Ces derniers temps je n’arrête pas de me blesser.


Surtout aux mains. 


Tout a commencé il y a deux semaines avec ce grille-pain au petit déjeuner dans un gîte où nous avions passé le week-end. J’y avais mis deux morceaux de pain en ayant déjà dans la bouche la sensation croustillante de la tartine chaude beurrée et confiturée à loisir. Mais alors que j’y mettais enfin les doigts pour récupérer mon précieux butin, l’un d’entre eux effleura malencontreusement la résistance encore brûlante. Se fût comme un électro-choc et alors que je ramenais les deux bouts de pain vers la table je regardais la peau de mon doigt se dissocier, révélant une fine couche blanche de cellules calcinées. Que je me dépêchais d’ôter, pensant, sottement, que l’histoire en resterait là. Mais en plus de la douleur chaude et excitée, que connaît au moins une fois dans sa vie toute personne un peu gourde, se mêlait un picotement tenace issu de la peau révelée à vif brutalement. Je cachais pendant plusieurs jours sous un pansement cette vilaine cicatrice qui ne semblait vouloir - ou pouvoir allez savoir- se remplir que d’un pus blanc des plus odieux.

 

Et alors que cette preuve de ma grande habilité manuelle commençait tout juste à disparaître, je renouvelais l’expérience de la brûlure en attrapant par réflexe la tasse de thé que je venais de mettre à réchauffer au micro-ondes. Sauf que je réussis cette fois-ci un coup double, l’habitude me faisant saisir la «poignée» des tasses de la pince index-majeur. J’eus donc droit, malgré un exercice marrant de positionnement de glaçon à cet endroit, à deux magnifiques cloques au dôme blanc sur les versants latéraux respectivement droit et gauche de ces deux doigts. 


Mais comme le dit si justement le proverbe ( maudit soit-il ) « jamais deux sans trois », je n’attendis pas même 24h pour renouveler l’exploit en m’accrochant le majeur gauche dans l’exercice périlleux d’ouverture d’une barquette en plastique rigide et en me pinçant l’une des deux cloques encore intacte ( fait rare après 24h d’existence ) ( comme quoi l’expérience peut parfois porter ses fruits ) dans la commande manuelle d’ouverture de volets électriques. 


ET POURTANT, je ne déteste pas mon corps. Je ne lui en veux pas non plus particulièrement. Spécialement mes mains qui sont des outils trop précieux au quotidien pour pouvoir consciemment les entailler sans arrière pensée ( essayez d’écrire avec une main dont la pince index-majeur, oui celle que vous utilisez pour tenir votre stylo, vous brûle d’un remords amère à chaque contact du plastique recouvrant le dit stylo-bille ).


Ou alors est-ce une manifestation inconsciente de mon corps dénonçant un ras-le-bol d’une manipulation intense de matériel électrique ? ( là je crois que c’est mon stage en psychiatrie qui me monte quelque peu à la tête ) Ah d’ailleurs, je vais devoir imposer une minute de silence à mes doigts, non pas pour feu - c’est le cas de le dire hinhin - leurs cellules épithéliales mais en raison de l’heure. Il est 20h04 et je ne peux décemment pas écrire - ou même bouger, manger, péter, respirer ? - alors que 4 chiffres pairs apparaissent sur mon écran. Et puis, je n’osais pas vous en parler mais, depuis quelque temps des drôles de voix ont pris place dans ma tête et me conseillent de prendre plus de temps pour moi, à regarder la TV plutôt que de succomber à la douce tentation de travailler mes cours de la journée. Et ce temps me déprime tellement que je pense que seul le fait de mettre ce qui reste de mes doigts dans une prise électrique va me permettre de repartir au quart de tour, ohéyéyé le soleil est pas là mais j’m’en fous mon cerveau est illuminé. 

Plus sérieusement. Je ne suis pas atteinte de TOC, de schizophrénie ( j’adore écrire cette pathologie ) ou de dépression profonde. Peut-être seulement d’une personnalité éponge qui s’imprègne de tout ce qui gravite autour d’elle. Et croyez-moi cette pathologie existe, sous un vrai nom que j’ai oublié of course, je l’ai rencontrée avec délectation lors de mon dernier stage en pédopsychiatrie ( Mamamia mais appelez un exorciste cette gamine est folle à lier !!!! ). D’ailleurs, puisqu’on en parle, quelqu’un peut m’expliquer la véritable vertu - prouvée et pas bidon - de la sismothérapie ? Pour les incultes ( comme moi au départ alors pas de moqueries hautaines svouplé ) je ne résiste pas au plaisir de vous copier-coller la fameuse définition de Wiki(pédia) :

 

La sismothérapie ou électroconvulsivothérapie (ECT) est une méthode de traitement par l'électricité utilisée en psychiatrie, consistant à délivrer un courant électrique de forte intensité sur le scalp, ce qui engendre une crise convulsive généralisée. L'application du courant est précédée d'une anesthésie générale de courte durée, environ 5 minutes. Ce traitement était anciennement plus connu sous le nom d'électrochoc ou d'électronarcose.

Ses indications sont les états dépressifs sévères, pour l'essentiel (les troubles de l'humeur en général, certaines formes de schizophrénie accompagnée de manifestations thymiques). L'anesthésie générale est couplée à une curarisation, ce qui évite les complications qui, entre autres, ont contribué à la mauvaise réputation de la sismothérapie : fractures vertébrales, luxations. Des séries de plusieurs chocs (une dizaine le plus souvent, mais parfois plus selon les individus) sont en général nécessaires pour obtenir un résultat.

 Même si la technique a beaucoup évolué, ce traitement reste encore très discuté et nombre de psychiatres refusent de l'effectuer.

 

Je kiffe la notion de «scalp». Ne serait-ce pas, d’ailleurs, un indice nous permettant de dévoiler le caractère subjectif de cette définition ? Et donc de comprendre que cette pratique, qui personnellement me choque, reste très très discutable dans son caractère barbare primaire ? Le débat demeure ouvert.

Bref. 


Je me suis un peu écartée du sujet. ( Maillan sors de ce corps ! )


Tout ça pour dire que mes mains ressemblent à celles d’un grand chef étoilé. Et encore, je suis presque sûre qu’il ne cuisine plus assez pour ça. Non plutôt celles du marmiton-larbin d’un grand chef étoilé.

 

Mouai, ça résume assez bien toute cette histoire d’actes manqués et de psychiatrie à haute dose que je m’enfile depuis un certain temps. 

 

Bref, j'ai les mains abîmées.

 

 

Edit : En photo, les plus belles mains que je connaisse, celles de ma grand-mère ...

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2 novembre 2011 3 02 /11 /novembre /2011 20:49

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Lundi 31 octobre 2011, 10h30 :

 

Le vombrissement d'un téléphone sur le bureau à côté du lit me tire de mes rêveries. Tout doucement je soulève un bout de couette et tends un bras encore tout endormi à la recherche ( tactile ) du satané smart phone. Raté. Un appel en absence. Nouveau sursaut téléphonesque quelques secondes plus tard. Nouveau message vocal. Je grogne en ramenant au chaud le bras malchanceux. Je change de côté et me blottis tendrement contre l'invité de mes songes. Celui-ci dort toujours profondément. Je souris et referme les yeux.

 

 

Lundi 31 octobre 2011, 11h30 :

 

Alors que je déjeune d'éclats de rire et de clins d'oeil complices mon téléphone joue encore les Cassandre, m'informant de nouveaux appels manqués. J'arrive enfin à décrocher ( à temps ) et un RDV est enfin fixé par une voix masculine. Suis un appel de Mamita quémandant quelques nouvelles de son ingrate petite fille. Je ris.

 

 

Lundi 31 octobre 2011, 13h30 : 

 

Alors que je m'apprête à sauter dans un bus, mon cher et tendre m'attrape par la taille et c'est parti pour un moment de tendresse. J'adore. Mes cheveux à peine secs de la douche jouent les libertins sur mes épaules. Je me sens belle, je me sens bien.

 

 

Lundi 31 octobre 2011, 14h15 :

 

Après la montée d'une vingtaine de marches bien tassées, mon petit coeur bat la chamade dans ma poitrine. Je reprends mon souffle et m'apprête à sonner à la porte du numéro indiqué sur mon petit papier violet. Je regarde l'heure sur mon portable, souris en pensant que bientôt je serais à nouveau dans ses bras.

 

 

Lundi 31 octobre 2011, 15h05 :

 

Je redescends les marches à la volée, le visage défait. Les yeux gonflés de larmes. Une camionnette passe devant moi et le conducteur me fait un sourire de travers. Je me sens sale. Mes mains tremblent. Je poursuis ma descente en rageant intérieurement. Je me sens faible. Je me sens mal.

 

 

Lundi 31 octobre 2011, 15h25 :

 

Je descends maladroitement du bus. Des types louches descendent en même temps que moi. J'ai peur, je ne sais même pas pourquoi. Je contourne le bus et traverse vite la route. " Hé, attention mad'moizelle, vous zallé vous faire écraser et ça serait bien dommage hein " ( rires gras ). Je me sens partir, mes yeux se plissent, je marche encore plus vite. J'arrive devant le hall d'entrée, je trébuche sur la marche, je cherche, fébrile, mes clefs. Le tintement familier me rassure un peu. Vite, bientôt je pourrai enfin imploser. L'ascenseur est déjà là, je m'y engouffre en croisant très fort les doigts. Contiens-toi. Encore un peu. J'arrive enfin devant ma porte, la respiration saccadée. J'entre dans l'appartement et je le vois, assis, bien occupé. Il me demande si tout va bien. Je referme la porte. Je tremble, la tête contre le faux bois, mon front soudain brûlant. Il est tout alarmé. Je me retourne, fonce dans ses bras et lâche prise à mon malheur.

 

 

Lundi 31 octobre 2011, 16h45 :

 

Je suis dans le box d'une salle du commissariat. Mon homme est là, me tenant la main. Mon interlocutrice essaie de détendre l'atmosphère. Je souris, faiblement. On me demande ma carte d'identité. Je me concentre, souffle un coup et réponds à toutes les questions. Un tapotement de touches de clavier fait écho à mes paroles. L'imprimante se met à cracher du papier. Je dois signer, là. Et voilà, j'ai déposé ma première main courante.

 

 

Mercredi 2 novembre 2011, 15h00 :

 

Un numéro masqué s'affiche sur l'écran de mon téléphone. Une boule au ventre me prend soudain et je ne décroche pas. J'attends un peu. Ah, nouveau message vocal. " Bonjour Mlle, ici le commissariat de police. Je viens de lire votre déposition suite à la main courante que vous avez déposée lundi dernier et souhaiterai m'entretenir avec vous à ce sujet. " Je rappelle aussitôt. " Je pense qu'une plainte pourrait sérieusement être envisagée mademoiselle car même s'il n'y a pas eu de violence à votre égard il y a eu atteinte à la pudeur ! ". Quelques mots, maladroits. " Mais je ne veux pas vous y forcer, je comprends très bien que vous soyez jeune et que cette triste expérience ne demande qu'à être oubliée, cependant vous pouvez nous aider en allant au-delà d'une main courante qui n'engage aucune poursuite, juste un signalement." Acquiescement. J'accuse le coup, j'ai besoin d'y réfléchir. " Je reste à votre disposition si vous souhaitez en reparler. En attendant bonne continuation à vous et prenez garde à l'avenir."

 

Mon coeur bat la chamade. J'ai les joues rouges. Mes yeux lisent et relisent l'écran d'ordinateur qui présente le cours que j'étais en train de ficher. J'ai envie de vomir. Je me sens mal. J'ai besoin de quelqu'un. Juste pour parler, pour évacuer. 

 

Le téléphone, fixe cette fois-ci, sonne. La voix claire et joyeuse de ma mère me sort de mon angoisse. Et je craque enfin et lui raconte tout. Silence. Et juste un rire, jaune. " Décidément ils s'y mettent tous à la mode DSK ". Je lui confie ma faiblesse, mes craintes, mon doute. Et elle me surprend, comme toujours. 

 

" Non mais attends là, c'est maintenant qu'il faut être féministe Camille. C'est là que tu fais véritablement avancer les choses. En parlant. En faisant voler en éclats tes craintes de victime. Certes, la main courante à été une bonne action. Mais il faut que ça lui serve de leçon à ce pervers ! Tu es une Tristane BANON qui ne va pas attendre 10 piges pour faire entendre sa voix. Et puis si ça donne lieu à des poursuites judiciaires tu t'en fous t'es pas connue. Il ne faudrait juste pas que ça te fragilise et enfonce le couteau dans la plaie. Alors fais ce qu'il te semble bon pour toi avant tout mais n'oublie pas la cause féministe ma puce. Et ce n'est pas ce con qui doit maintenant te faire peur. Tu ne risques rien, tu m'entends. Rien de plus que tout un chacun dans sa vie de tous les jours. Et tout peut arriver. Mais si on se barricade contre le risque éventuel, on ne vit plus ma chérie. Alors termine cette histoire, va jusqu'au bout et tourne la page bien vite après. J'ai confiance en toi. "

 

 

Mercredi 2 novembre 2011, 21h30 :

 

C'est la tête confuse et les idées embrouillées que j'essaie de trouver la meilleure approche pour vous raconter ce que j'ai ressenti et dans quel état je suis ce soir. Des nems et un bol de riz cantonnais ont adouci mes aigreurs d'estomac. L'odeur encore présente de mon chéri sur mon oreiller m'aide à faire face à tous ses sentiments contradictoires qui me submergent depuis lundi. Je voulais que vous soyez informés. Tous en une seule fois. Afin de m'éviter les nouveaux récits qui me fragilisent plus que je ne pouvais le penser. Et puis pour que ce soit une sorte de témoignage qui puisse aider quelqu'un un jour aussi à en parler. Ne vous inquiétez pas rien de grave n'est arrivé, j'ai juste été choquée. 

 

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2 octobre 2011 7 02 /10 /octobre /2011 19:34

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Alors que mon individualisme reprenait le dessus en prévision de cette nouvelle année scolaire loin de ceux qui m'entourent j'ai été rattrapée par un sourire de nouveau-né.

 

6 semaines, des mini boucles ornant déjà sa toute petite tête, il était là, tout près de moi, endormi les bras au-dessus de sa tête comme figés dans un étirement pour grandir plus vite, dans un couffin fait de tissu et d'osier. Je n'avais même pas eu le temps de m'attendrir qu'une petite tête blonde bondissait tout autour de moi pour me détourner du trésor tant convoité par les adultes de passage. Une petite queue de cheval finissant en 3 anglaises parfaitement formées, deux grands yeux bleus, un petit nez coquin et une bouche infatigable qui m'assaillait de " pourquoi ? ". 

 

Une émotion. Aors que je redécouvrais La petite sirène, 10 ans après mon dernier visionnage, avec blottie contre moi une petite âme qui ne trouvait pas " gentille la vilaine sorcière noire ". D'ailleurs, une fois atteinte la durée limite de visionnage prédéfinie par l'ordre parental, j'ai mis le dessin animé sur pause. Pour pouvoir le reprendre une fois la petite couchée. 

 

Une avalanche de bisous. " Encore un bisou Camille, et un bisou de maman et de papa aussi ". Et des caresses. Des vagues de caresses sur son front tout doux. Un chuchotement dans mon oreille alors que je m'en allais enfin. " Et maintenant tu vas partir, mais tu vas revenir, t'es plus en vacances maintenant ". Un rire.

 

Une fois la porte de la chambre à coucher refermée, je suis retournée m'installer sur le grand canapé. Tout en surveillant de l'oeil le sommeil de ce si tout petit bébé. Et c'est alors que doucement deux petits yeux se sont réveillés. Ils m'ont dévisagé, lentement, entre deux clignements de paupière, pour se figer sur un point fixe quelque part entre ma bouche et mon nez. Je l'ai soulevé, maintenant sa petite tête d'une main et tout son corps de l'autre et nous nous sommes découvert pendant un long moment.

 

J'ai gazouillé. Il souriait. De grands, beaux, francs sourires. Les plus beaux sourires qu'il m'ait été donnés de voir. Ou plutôt recevoir. Car bien plus qu'une imitation, je ressentais toute la communication qui passait par ce lien de douceur, cet étirement d'une toute petite commissure, une micro-mini lèvre toute chou. 

 

Cette rencontre a été magique. J'ai presque été émue aux larmes de ressentir cette si petite vie entre mes mains et de la voir me sourire tout de suite, si confiante, si fragile comme si elle lisait en moi tout ce que je ne pourrai jamais dire avec des mots. J'ai aimé changer cette première couche dans notre histoire à tous les deux, ce premier bib' goulûment avalé, cette étreinte pour accompagner le premier rôt, cette première tâche de lait sur ma manche en cadeau, cette odeur de bébé sur ma peau.

 

Cette soirée m'a rapprochée, indéniablement, des heureux parents. J'ai senti toute leur confiance et même leur amour parental m'envelopper et m'intégrer dans ce si doux cocon familial. Et j'en ai été émue. Je n'avais jamais ,depuis plus de 12 ans maintenant, eu l'occasion de m'occuper d'un nouveau-né. Et Ils ne l'avaient encore jamais fait garder.

 

Je suis rentrée chez moi des étoiles dans les yeux, avec au ventre une énergie à déplacer des montagnes. Je me suis endormie, après avoir étanché cette soif d'action, dans un soupir de satisfaction. Ma journée du lendemain fût encore bien remplie mais une autre belle surprise m'attendait en rentrant chez moi. Une nouvelle familiale. Un email rempli d'amour annonçant l'arrivée d'un heureux événement. J'ai dévoré des yeux les photos des deux héros et ait eu la larme à l'oeil, débordement lacrymal du trop plein d'amour de mon coeur, en découvrant le regard groggy mais passionné de ma cousine envelopper son tout nouveau nouveau-né. Alors ça y est, un petit Victor est né.

 

Et la petite Sirène c'est toujours aussi chouette ;)

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20 septembre 2011 2 20 /09 /septembre /2011 23:21

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Hier ma journée fut passionnante.

 

Elle débuta par l'émission des maternelles avec ce débat révélateur pour moi : " comment réagir face à un enfant hypersensible/ hyper émotif ". Les maman invitées pour parler de leurs enfants se retrouvèrent finalement à parler d'elles-mêmes. De leur propre enfance et de leur façon de traiter leurs émotions. La peur d'être jugée, de ne pas être acceptée par les autres au premier coup d'oeil, la peur de décevoir et donc de l'échec, et puis indubitablement la peur de l'isolement. Et ça m'a fait réfléchir. Alors que les enfants qui étaient décrits comme hypersensibles apparaissaient l'être depuis la naissance, je me suis demandée quand, chez moi, j'avais véritablement perçu cette différence et les difficultés qui vont avec. 

 

De mes premières années je n'ai que de vagues souvenirs. Sûrement acquis bien après cette période, transformés en souvenirs tout de suite appropriés à la suite de petites anecdotes racontées par la famille. De l'école maternelle me reviennent quelques événements : un petit frère scotché à mes jambes à la récré, une maman enceinte puis à la maternité, un papa débordé qui oubliait parfois de me mettre une culotte avant d'aller à l'école, et un amoureux très collant qui voulait à tout prix m'offrir des fleurs quand nous nous serions mariés. En bref, rien de vraiment traumatisant.

De l'école primaire il me reste de belles amitiés. Mes premiers baisers volés au chat perché, des chansons allemandes et autres expressions alsaciennes, des dessins griffonnés sur le coin des cahiers et un intérêt grandissant concernant la puberté des garçons. Mais je ne me souviens pas m'être jamais senti isolée ou même jugée à cette période.

Les soucis ont commencé avec ma rentrée en 6°. Déracinée de mon Alsace enfantine, j'ai atterri dans un collège de la campagne aixoise suite à un déménagement familial. Et c'est à cette période que le peu de confiance en moi qui s'était construit harmonieusement jusqu'alors s'est effondré. Pour quelles raisons ? Avec le recul j'en citerai deux. Tout d'abord le choc des cultures entre la population du nord de la France et celle du sud. Car dans mon école primaire alsacienne se côtoyaient des enfants de toutes religions, et de tous niveaux de vie. Nous ne prêtions donc pas plus que ça d'attention à nos vêtements ou autres signes extérieurs qui nous différenciaient les uns des autres. Mais dans le Sud j'ai tout de suite ressenti cette culture de l'apparence. Et mes pantalons vert prairie signés Kenzo ou mes chemisiers col claudine ne m'ont pas vraiment valu un grand accueil. Mais plutôt une angoisse des récrés, moments solitaires où j'étais obligée de quitter la salle de classe pour me cacher dans un coin de la grande cour, délaissée par tous. Deuxième raison, mes bonnes notes. Qui m'ont très vite valu d'être cataloguée comme une " intello ". Je me suis donc sentie rejetée, mal jugée et rendue indigne de copiner. Je me souviens des batailles que j'ai du mener afin d'expliquer à mes parents que mes vêtements freinaient toute relation sociale, des larmes que j'ai versé de nombreux soirs en cachette la tête enfouie dans mon oreiller, des crampes au ventre quand le réveil sonnait sorte de glas pour le pénitencier. Puis, doucement, je me suis effacée, sentant comme ce besoin de créer du lien social avec les gens de mon âge était primordial. J'ai délaissé quelques matières, aidé certains à obtenir de bonnes notes en jetant un coup d'oeil sur ma copie, et je suis finalement entré dans un groupe d' " amies ". Mais ce n'était pas moi.

Ce faux-semblant qui dura 3 ans eut de grosses répercussions sur l'image que j'avais de moi, de mon corps, de mon appréciabilité. Et mon déclic fut, vous vous en doutez, la lecture puis l'écriture. Mais surtout le changement d'établissement, suite à un nouveau déménagement. Et je remercie mes parents qui, inconsciemment à ce moment, m'ont permis de faire peau neuve. En effet dans ce nouveau collège j'ai découvert des gens plus tolérants, plus exigeants également dans leur travail scolaire et je me suis sentie à nouveau en harmonie avec les gens de mon âge. Bien que cela m'ai laissé des séquelles. Comme une passion des fringues et autres emblèmes de la personnalité. Ou plus profondément, un mal être et une timidité quand je gagne une nouvelle communauté. Car j'ai toujours peur de n'être pas aimée. De ne pas être jugée digne d'intérêt et de revenir à ces années collège où je me cachais dans l'ombre des autres. 

 

Et le débat animé ce matin par l'émission des Maternelles prenait tout son intérêt dans le portrait des solutions que ces femmes avaient mis en place pour se protéger et permettre à leur vraie personnalité de s'exprimer, sans crainte d'être trahie à tout moment par des émotions incontrôlables. Et je me suis également reconnue dans ses témoignages qui sont autant de victoires de l'adulte que l'on devient sur l'enfant que l'on était. J'ai aimé cette conclusion d'une des maman qui finalement se trouvait choquée de sa propre réaction parentale vis à vis du mal être de sa fille. Alors que petite elle s'était elle-même sentie abandonnée par ses proches face aux mêmes réactions. Car cela amène une vérité : n'oublions pas trop vite l'enfant que nous avons été. Comme si, finalement, le fait d'être parent nous obligeait aussi à nous souvenir de ce que c'est que d'être un enfant.

 

Comme je le disais en préambule, hier ma journée fut passionnante. Car j'ai pu me coucher avec dans la tête cette chanson de Maxime Le Forestier, grâce à un superbe documentaire sur France3. Et cette ode à San Francisco fraîchement découverte en famille m'a semblé très bien refermer cette parenthèse enfantine. Du temps où j'écoutais ces paroles en imaginant cette maison atypique perdue à la cime des montagnes ...

 

C'est une maison bleue, adossée à la colline, l'on y vient à pied, les gens qui vivent là ont jeté la clef ...

 

 

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19 septembre 2011 1 19 /09 /septembre /2011 11:48

IMG 0011Après quelques semaines d'affilée sur Paris je commence à trouver mes habitudes et même à me sentir chez moi ou devrais-je dire chez nous (hihi ) dans ce 32 m2 de la rue de Paris ( ben tiens ) de Charenton-le-Pont. En effet, après avoir passé quelques jours à apporter the feminal touch à cet appart déjà superbement aménagé par mon cher et tendre, j'y ai en effet pris mes aises, m'installant un QG dans la cuisine en cuisinant avec Marmiton sur l'Ipad ou bouquinant pendant des heures sur le grand canap' façon méridienne du séjour.

 

Mais je suis également tombée dans le piège de la belle capitale. J'ai farfouillé dans tous les Bazars, Monop et Carrouf du coin pour trouver des bougies ou autres concepts de déco, dévalisé les petites boutiques de la rue marchande qui me narguaient avec leurs fins de soldes, et ai passé des heures sur internet afin de trouver des adresses sympa où traîner son amoureux le week-end. J'ai également maltraité mes pieds, qui s'étaient eux bien habitués au rythme des baskets de touriste, en ne portant presque exclusivement des talons. Et j'ai butiné de Starbucks en Starbucks ( ma préférence allant à ceux de la rue de Rivoli et de Bercy village ) où je me suis régalée de nombreux jus d'orange pressés et autres chocolat-au-lait-avec-chantilly-steuplé. J'ai brandi fièrement ma nouvelle carte Navigo forfait semaine à chaque entrée dans le métro, j'ai poussé la porte de nombreuses boutiques où ma curiosité s'est régalée, j'ai dégusté de superbes desserts dont certains sur les Champs Elysées et j'ai voyagé, dans ce tourbillon de nouveautés jusqu'à me faire rattraper par une autre réalité.

 

Mon compte en banque. J'ai donc décidé de stopper quelque peu ce flot d'excès, semble-t-il particulier à la capitale. J'ai fait des listes de courses avant de me rendre au supermarché et j'ai arrêté de m'extasier devant tous les shampoings du rayon beauté. J'ai troqué mes escarpins contre de bonnes vieilles ballerines. J'ai délaissé ma carte Navigo pour des carnets de tickets. J'ai fait des crêpes à la maison plutôt que d'en acheter. Je me suis trouvé de nouvelles occupations, un peu plus sages mais aussi plus casanières. J'ai effacé de ma tête toutes les tentations vestimentaires que j'y avais enfermées, je m'essaie au concept de désir plutôt que celui de pulsion. Bien que ce soit en réalité le plus dur du travail. J'ai conscience d'avoir une relation spéciale à l'achat. Et j'essaie de changer. Mais mon petit diable me murmure encore souvent à l'oreille que la vie est faite pour être vécue. Et il n'a pas si tort. Mais reste à moi de trouver un équilibre qui me corresponde plus sans me mettre en danger.

 

Et puis curieusement cela n'a pas créé un aussi grand vide que je le craignais. J'ai même été surprise de voir le bonheur que je ressentais en enfilant mon dernier jean acheté, parce qu'il était en soldes mais surtout parce qu'il me plaisait, et en l'associant avec des ballerines oubliées, bref en réinvestissant mon dressing débordé. J'ai également découvert avoir ramené un autre souvenir de mon voyage aux Etats-Unis : un peu plus de confiance  en soi. C'est comme si d'avoir vu autant de personnes différentes physiquement mais très bien intégrées et assez à l'aise avec les autres m'avait ouvert les yeux sur ma propre stupidité à vouloir me trouver comme-tout-le-monde des défauts. Et je peux maintenant le crier. J'AIME MON CORPS.

Et depuis ce week-end je réinvesti aussi un peu mon côté créatif, et ai hâte de vous faire partager bientôt sur ce blog mes nouvelles créations qui bien que chronophages donnent à mes journées un nouveau plus, la satisfaction d'un travail bien fait.

 

Voilà. J'avais besoin de partager aussi cette partie-là de moi. Peut-être pour vous inclure dans ce combat et me confier en toute liberté sans crainte de jugement bon ou mauvais. Et puis, sait-on jamais, je ne suis peut-être pas la seule à réagir ainsi face à notre société de consommation ... 

 

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16 septembre 2011 5 16 /09 /septembre /2011 12:49

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Dans un plat en verre je dispose consciencieusement les morceaux de poulet que je viens de dépecer. Je fais glisser un peu de jus cristallisé du tupperware ainsi que les 3 bouts d'oignon qui l'accompagnent. Et pendant que les marrons décongelés se font un SPA dans la casserole noire sur le feu, je rêve. J'ai du mal à sortir de mon lit. Je bâille souvent, la joue toute fripée par mes heures de sommeil bien consommées. " Plus on dort et plus on a envie de dormir " me chuchote une voix tonitruante. Et je souris.

 

 

Je la revois, belle, rousse, ses cheveux élégamment relevés autour de son visage. Ses boucles si savamment sculptées par des bigoudis par milliers mais froissées aussitôt par ses mains expertes. " Je ne veux pas faire trop sophistiquée ".

 

Je perçois son odeur de savon doux honorant sa peau de pêche plissant sous le poids des années. J'aime ses rides au coin des yeux. Et mon doigt qui s'applique à maintenir sa paupière alors que je la maquille. Son rire de demoiselle quand elle découvre le résultat. " Mais ça fait si naturel ! Et mes cils ... Jamais je n'arrive à les allonger de la sorte ! C'est quoi ton mascara ? "

 

J'aime me souvenir de ces moments de complicité. Et leur fraîcheur. J'aime conserver en bruit de fond la présence de mon amoureux, maltraitant la porte familiale en chêne massif à coups de ponceuse électrique. J'aime comme notre séjour lui fait plaisir.

 

Des éclats de rire percent la réalité de mes songes alors que je revis nos parties de Triomino. Je les vois, tous les deux, se chamailler les pièces de la pioche comme des enfants. Et pourtant l'un a 20 ans et l'autre 70 ans. Ou presque. Mais dans ce royaume du souvenir, l'âge ne compte pas. Il s'évapore au contact du bonheur.

 

Et je redeviens toute petite, me rendant au jardin avec mon petit seau et mes fraises. Avec cette luminosité des Walt Disney qui enveloppe toute la nature environnante, et je saute, à cloche-pied, de halo en halo.

 

J'ai toujours le ventre bien tendu en sortant de table, régalée par une jardinière de légumes ou une purée de pommes de terre maison. Et les pièces embaument l'odeur de pain d'épices qui s'échappe du four.

 

J'aime l'histoire qui transpire à chaque pierre de taille formant la maison familiale. J'aime descendre à la cave, longtemps interdite, et regarder la source d'eau perler le long des roches humides. J'aime l'entendre me raconter la vie paysanne, l'histoire de mes ancêtres. J'aime déjeuner tous les jours dans l'ancienne étable, là où les vaches chauffaient toute la maison. J'aime chercher dans la vieille armoire les traces de l'impact d'une balle allemande au temps des résistants. 

 

 

La sonnerie du minuteur me sort de ma rêverie. J'égoutte les marrons et les couche sur le poulet avant de remettre l'ensemble au four. Poulet fermier et marrons maison, évidemment. Ce sont les derniers vestiges de notre passage dans le Morvan, quitté mardi déjà. 

 

 

Je me souviens aussi de mes larmes face à sa solitude. De nos au revoirs, brefs mais intenses. Des bras de Nico dans lesquels je trouve si souvent tout le réconfort qu'il me faut. Émotive, hypersensible, mes larmes sont les mots de mon coeur. J'ai aimé ces quelques jours passés auprès de ma grand-mère, ou Mamita pour les intimes. Et c'est dur de quitter les gens qu'on aime sans savoir quand on pourra les revoir ...  

 

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19 août 2011 5 19 /08 /août /2011 15:29

Image-2-copie-1.pngEh oui je suis rentrée. J'ai retrouvé, bien chargée, un amoureux tout ému derrière les grandes portes du hall de l'aéroport. Je l'ai embrassé et j'ai continué à profiter de la douceur de ses lèvres qui m'avait tant manquée. De ses bras qui m'apportent tant lorsqu'ils m'entourent. Et de ses yeux qui m'offrent un océan de possibilités.

 

Malgré la brume de fatigue qui gagnait peu à peu mon cerveau nous nous sommes baladés, main dans la main, dans un Paris au mois d'août. J'ai retrouvé le plaisir, immense, de pouvoir s'installer sur un banc et d'y rester pendant des heures, à contempler les gens qui passent et parler, rire en même temps. 

 

J'aime ce temps de ré-adaptation où après avoir nagé dans l'atmosphère d'une langue étrangère on s'étonne presque de comprendre et d'entendre tant de gens autour de nous. Où on se retient de dire " Sorry " alors qu'on vient de bousculer quelqu'un ou " Hello, How are you ? " quand on rentre dans un commerce. Notre petit cerveau fait vraiment des efforts pour quitter ces habitudes qui demeurent maintenant obsolètes. 

 

Contente d'être rentrée donc, de retrouver en plus de chéri une petite boule de poils trop longtemps délaissée, et de ne plus s'arrêter de la caresser. Contente d'entendre dans le combiné des nouvelles du monde qui a continué à tourner. Contente de dénicher encore les dernières bonnes affaires de l'été, avant qu'elles ne soient vite remplacées par la rentrée. Contente de pouvoir manger ce dont on a l'habitude et en petite quantité. Contente de profiter de ces dernières semaines d'été.

 

Mais ... le voyage a également ses regrets. Les grands sourires et les formules polies, la nonchalance touristique, les petit-déjeuner gargantuesques, les merveilles découvertes chaque jour, les multiples facettes d'un pays qu'on découvre petit à petit. Oui, tout ceci va aussi me manquer, je le sais. Assez pour me donner l'envie de vite repartir mais cette fois-ci avec un élément indispensable dans mes bagages, cette seconde moitié qui me manque tant dans la durée, qui réconforte et apporte tellement de magie au sein de l'aventure la plus banale. Oui, je reviendrai, mais maintenant j'aspire juste au calme et à la volupté. 

 

La rame de métro m'offre un doux balancement. La tête sur son épaule je m'adonne à diverses rêveries. Et puis le silence se fait dans le wagon, je me sens bien, quel doux moment, et ... " Tu te réveilles ma chérie on est enfin arrivés ! ". Voilà, s'endormir dans le métro en fin de journée, un palier de plus de franchi pour une future parisienne maltraitée par le décalage horaire ;)

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5 juillet 2011 2 05 /07 /juillet /2011 23:50

 

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Une boule au ventre. Dès le réveil je l'ai sentie, là, tout près, juste entre le noeud de gorge et la pointe au niveau du sternum. Une sensation désagréable et des idées tourmentées. Ma matinée fut studieuse, entre deux gorgées de jus d'orange. Puis j'ai pris du temps pour moi, du temps pour me préparer, chouchouter le physique pour calmer le psychique. Et ça a plutôt marché. J'ai pris le volant avec Maman et Loulou, pour m'exercer, dans toutes les petites rues vicieuses d'Aix et ai salué tous les rond-point. Mais la boule au ventre ne m'a pas lâchée. Appuyant même parfois un peu plus après une bête erreur de conduite, comme une mortification silencieuse. Je n'ai presque rien pu avaler au déjeuner, redoutant le décompte jusqu'à l'heure critique. Mais j'ai pris mon courage à deux mains, la mort dans l'âme, et ai grimpé dans le bus pour ma destinée. Une chaleur étouffante berça mes dernières révisions et c'est d'un pas fébrile que je franchi les derniers mètres me séparant des portes de l'auto-école. Et puis ...

 

Et puis, j'ai pris un tournant. Décisif le tournant. J'ai mis les BOUM BOUM stridents de mon petit coeur dans ma poche et ai gardé toute ma concentration pour la route et les informations données par mon moniteur. J'ai soufflé un bon coup, mais intérieurement. Je me suis détendue et je l'ai eue. Oui j'ai eu cette date de permis qui ne m'était pas encore véritablement acquise avant cette leçon décisive. En descendant du véhicule, après mes 45 min de conduite, je marchais dans de la ouate. Grave. Et s'est alors que je me suis envolée.

 

J'ai souri bêtement, j'ai fermé les yeux et quand je les ai rouvert, je n'étais plus au même endroit. Loin, le tumulte d'Aix en préparation de soldes. Loin, la circulation bruyante et les coups de klaxon. Loin, la petite clio de l'auto-école. Je me suis réveillée sur une plage des Lecques, en maillot de bain deux pièces. Mes petites soeurs sautaient dans les vagues et maman somnolait à côté de moi. Le vent caressait ma peau dénudée en y déposant quelques grains de sable. Des bébé gazouillaient. Un kaléidoscope de couleurs s'étalait sur des maillots de bain de toutes sortes. Des pelles et des râteaux surmontaient de frêles châteaux de sable. Une odeur de Chichi surplombant celle, ambiante, de la crème solaire titillait mes narines. Mes cheveux nattés chatouillant mon cou, j'étais bien. Mon esprit s'évadait, amusé par la proximité d'un nombre important d'autres destins. Je respirais. Enfin. Plus tard je me levais et rentrais dans la mer pour vérifier que tout ceci était bien réel et les vagues, vexées, enroulèrent mes chevilles d'algues. Elles venaient mourir sur mes hanches, éclaboussant mon petit ventre frileux. Je riais.

 

Encore plus tard, je clignais des yeux et nous retrouvais toutes attablées au MacDo du coin, mon appareil photo dégainé afin d'immortaliser ces sourires repus. J'embrassais d'un regard amoureux toute cette joyeuse troupe et aurai tout donné pour voir ce moment se prolonger.

Très tard, à moitié allongée dans le grand canapé-lit du pool-house, le corps respirant l'après-soleil fraîchement appliqué, j'aurai envie de vous transcrire cette journée atypique, entre cauchemar et volupté. Comme quoi, un grain de sable peut tout faire basculer ...

 

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